Mémoires de Master 2 soutenus à la Faculté Jean Monnet

Droit de la construction et de l'urbanisme
Année universitaire : 2013-14

  • Auteur : Jeremy Bachelard
  • Directeur : Jean-Eric Callon

Application contentieuse de la responsabilité décennale : les leviers à la disposition de l'assureur 

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  • Résumé :


    Le système de responsabilité des constructeurs actuel issue de la loi Spinetta de 1978 s’articule autour d’une notion centrale : la réception de l’ouvrage définit par l’article 1792-6 du Code civil comme « l’acte par lequel le maitre d’ouvrage accepte l’ouvrage avec ou sans réserves». En droit civil, la réception peut prendre trois formes. Elle peut tout d’abord être « expresse », c’est-à-dire constatée dans un écrit appelé procés-verbal de réception comportant ou non une liste de réserves. L’écrit n’est pas une condition de la réception mais permet d’en rapporter preuve. En l’absence d’écrit, la réception peut être « tacite ». Selon la jurisprudence, elle résulte de « la volonté non équivoque du maitre d’ouvrage d’accepter l’ouvrage ». La volonté (notion subjective) peut se déduire d’éléments objectifs dégagés par la jurisprudence dont les plus pertinents sont la prise de possession de l’ouvrage et le paiement complet du prix des travaux. Les éléments objectifs ne doivent que caractériser la volonté non ambigué du maître d’ouvrage de réceptionner et permettent aucunement de caractériser automatiquement la réception tacite. Lorsque survient un desaccord entre le maître de l’ouvrage et le constructeur sur la réception de l’ouvrage, une des parties peut demander au juge de prononcer une réception « judiciaire ». Le juge ne peut le faire que lorsque l’ouvrage est « en état d’être reçu », c’est-à-dire lorsqu’il n’est pas atteint d’un vice de gravité décennale - atteinte à la solidité et/ou impropriété à destination. Lorsque l’ouvrage n’a pas été réceptionné ou lorsque le dommage survient avant la réception prévue, le maitre d’ouvrage ne pourra engager que la responsabilité contractuelle et délictuelle de droit commun du constructeur.



    A partir de la réception, le maitre d’ouvrage dispose de trois garanties spéciales dues obligatoirement par les constructeurs (les personnes désignées à l’article 1792-1). Pendant l’année suivant la réception, le constructeur doit au titre de la garantie de parfait achèvement la levée des dommages réservés à la réception. Pendant les deux années suivant la réception, le constructeur est responsable des désordres affectant les éléments d’équipement dissociables de l’ouvrage (article 1792-3 du Code civil) au titre de la garantie de bon fonctionnement. Enfin, pendant les dix années suivant la réception, le constructeur doit garantir au propriétaire de l’ouvrage la réparation des dommages à l’ouvrage de nature décennale (article 1792 du Code civil) et ceux affectant les éléments d’équipement non dissociable de l’ouvrage (article 1792-2 du Code civil) (garantie décennale). Pour tous les désordres qui ne sont pas pris en charge par ces garanties, notamment les désordres intermédiaires consécutifs, le maitre d’ouvrage peut engager la responsabilité contractuelle de droit des constructeurs pendant les dix années suivant la réception (article 1792-4-3 du Code civil).



    Afin d’assurer une meilleur protection du maitre d’ouvrage, le législateur impose aux constructeurs de souscrire une assurance obligatoire dite de responsabilité décennale (article L 241-1 et L 241-2 du Code des assurances). S’agissant du maitre d’ouvrage, ce dernier doit souscrire une assurance dite de dommages - ouvrage dont l’objet est de procéder au paiement des réparations des dommages dont sont responsables les constructeurs au titre de la garantie décennale. En pratique, les assureurs joignent aux garanties obligatoires des garanties facultatives susceptibles de jouer avant ou après la réception.



    En cas de litige entre un maitre d’ouvrage et un assureur de responsabilité décennale, comme dans le cas exposé, ce dernier ne doit au propriétaire de l’ouvrage que la réparation des dommages à l’ouvrage portant atteinte à la solidité ou à la destination de celui-ci et cela pendant un délai de dix ans suivant la réception. En pratique, le contrat d’assurance prévoit généralement des garanties facultatives et complémentaires dont le régime d’application, qui est moins strict qu’en matière de garanties légales, dépend de la liberté contractuelle des parties. Lorsque la condamnation de l’assureur est inévitable, c’est le montant de l’indemnité qui doit être critiqué. Pour exemple, l’assureur peut dans certaines hypothèses verser une indemnité hors taxes.De la même manière, s’agissant de la garantie obligatoire, l’assureur ne peut certes pas opposer une franchise contractuelle au bénéficiaire de l’indemnité (Annexe I à l’article A. 243-1 du Code des assurances), mais peut demander le remboursement de la franchise avancée à son assuré (le constructeur). S’agissant des garanties facultatives, l’assureur peut opposer les franchises au maitre d’ouvrage victime.



    Ces leviers ne sont que des exemples concrets tirés d’une étude de cas qui ne peut permettre à elle seule d’exposer l’ensemble des moyens de défense à la disposition des assureurs tant la matière est « ballottée par le jeu des circonstances et des intérêts en cause ».

  • Langue du texte : Français
  • Mots-clés : Assurance-construction, garantie décennale, garantie de bon fonctionnement, garantie de parfait achèvement, assurance dommages-ouvrage
  • Domaine(s) :
    • Droit de l'urbanisme
  • Nombre de pages : 50
  • Références juridiques liées :


    Loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et à l'assurance dans le domaine de la construction,Civ. 3ème, 27 février 2013, n° 12-12148, Civ. 3ème, 10 juillet 2013, n°12-21910, Civ. 3ème, 12 janvier 2005 n° 03-17431, Civ, 3ème, 18 juin 2003, n°01-12886, Civ. 3ème, 27 janvier 2010, n° 08-19763, Civ. 3ème, 8 novembre 2006, n° 04-1814, Civ. 3ème, 8 avril 2014, n° 13-16250, Civ. 3ème, 12 février 2014, n°13-10930, Civ. 3ème, 11 janvier 2012, n° 10-26898, Civ. 3ème, 12 septembre 2012, n° 11-16943, Civ. 3ème, 23 octobre 2012, n° 12-24201, Civ. 3ème, 22 octobre 2013, n° 12-20707, Civ. 3ème, 23 avril 1997, n° 95-13648, Civ. 1ère, 17 novembre 1998, n° 96-19263, Civ. 3ème, 6 novembre 2007, n° 06-17275